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Barbara (June 9 1930 – November 24 1997)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dis Quand Reviendras-tu?

 

 

 
Voilà combien de jours, voilà combien de nuits,
Voilà combien de temps que tu es reparti,
Tu m’as dit cette fois, c’est le dernier voyage,
Pour nos cœurs déchirés, c’est le dernier naufrage,
Au printemps, tu verras, je serai de retour,
Le printemps, c’est joli pour se parler d’amour,
Nous irons voir ensemble les jardins refleuris,
Et déambulerons dans les rues de Paris,

Dis, quand reviendras-tu,
Dis, au moins le sais-tu,
Que tout le temps qui passe,
Ne se rattrape guère,
Que tout le temps perdu,
Ne se rattrape plus,

Le printemps s’est enfui depuis longtemps déjà,
Craquent les feuilles mortes, brûlent les feux de bois,
A voir Paris si beau dans cette fin d’automne,
Soudain je m’alanguis, je rêve, je frissonne,
Je tangue, je chavire, et comme la rengaine,
Je vais, je viens, je vire, je me tourne, je me traîne,
Ton image me hante, je te parle tout bas,
Et j’ai le mal d’amour, et j’ai le mal de toi,

Dis, quand reviendras-tu,
Dis, au moins le sais-tu,
Que tout le temps qui passe,
Ne se rattrape guère,
Que tout le temps perdu,
Ne se rattrape plus,

J’ai beau t’aimer encore, j’ai beau t’aimer toujours,
J’ai beau n’aimer que toi, j’ai beau t’aimer d’amour,
Si tu ne comprends pas qu’il te faut revenir,
Je ferai de nous deux mes plus beaux souvenirs,
Je reprendrai la route, le monde m’émerveille,
J’irai me réchauffer à un autre soleil,
Je ne suis pas de celles qui meurent de chagrin,
Je n’ai pas la vertu des femmes de marins,

Dis, quand reviendras-tu,
Dis, au moins le sais-tu,
Que tout le temps qui passe,
Ne se rattrape guère,
Que tout le temps perdu,
Ne se rattrape plus…

 

 

 

 

La Solitude

 

 

 
Je l’ai trouvée devant ma porte,
Un soir, que je rentrais chez moi.
Partout, elle me fait escorte.
Elle est revenue, elle est là,
La renifleuse des amours mortes.
Elle m’a suivie, pas à pas.
La garce, que le Diable l’emporte !
Elle est revenue, elle est là

Avec sa gueule de carême
Avec ses larges yeux cernés,
Elle nous fait le cœur à la traîne,
Elle nous fait le cœur à pleurer,
Elle nous fait des mains blêmes
Et de longues nuits désolées.
La garce ! Elle nous ferait même
L’hiver au plein cœur de l’été.

Dans ta triste robe de moire
Avec tes cheveux mal peignés,
T’as la mine du désespoir,
Tu n’es pas belle à regarder.
Allez, va t-en porter ailleurs
Ta triste gueule de l’ennui.
Je n’ai pas le goût du malheur.
Va t-en voir ailleurs si j’y suis !

Je veux encore rouler des hanches,
Je veux me saouler de printemps,
Je veux m’en payer, des nuits blanches,
A cœur qui bat, à cœur battant.
Avant que sonne l’heure blême
Et jusqu’à mon souffle dernier,
Je veux encore dire “je t’aime”
Et vouloir mourir d’aimer.

Elle a dit : “Ouvre-moi ta porte.
Je t’avais suivie pas à pas.
Je sais que tes amours sont mortes.
Je suis revenue, me voilà.
Ils t’ont récité leurs poèmes,
Tes beaux messieurs, tes beaux enfants,
Tes faux Rimbaud, tes faux Verlaine.
Eh ! bien, c’est fini, maintenant.”

Depuis, elle me fait des nuits blanches.
Elle s’est pendue à mon cou,
Elle s’est enroulée à mes genoux.
Partout, elle me fait escorte
Et elle me suit, pas à pas.
Elle m’attend devant ma porte.
Elle est revenue, elle est là,
La solitude, la solitude…

 

Solitude
I found her in front of my door one evening when I returned home. She accompanies me everywhere  – she has come back – she is there, the stalker of dead loves. She followed me step by step.  That little bitch, to heck with her.
She has returned, there she is. With her lenten mouth her large hollow eyes. For us she makes the heart trail behind, she makes the heart weep – she makes the hands pallid and the long nights desolate. That little bitch, she makes us have winter in the full heart of summer.  In your sad robe of watered silk, your hair all unkempt, you wear the face of despair, you are unlovely to see. Go away, leave, go and take your sad bored mouth somewhere else. I have no taste for sadness, go away, and look somewhere else in case I’m there!
I want to swing my hips again, I want to get drunk on spring. I want to be paid in sleepless nights with a heart that beats – a beating heart. Before the tolling of that pale hour and until my last breath I want to say again “I love you” and I want to die for love.
She said “Open your door.  I’ve been following you step by step.  I know your loves are dead, I returned – here I am. They have declaimed their poems, your fine gentlemen, your lovely children, your fake Rimbaud, your fake Verlaine. Well fine, that’s all over now. Since then she has given me sleepless nights, she has hung on my neck and has curled herself up in my lap. She goes with me everywhere. She dogs my every step. She waits for me outside my door. She has returned, she is there….
Solitude,  – solitude….

 

 

 

 

Plus Rien

 

 

Plus rien, plus rien
Que le silence,
Ta main, ma main
Et le silence
Des mots. Pourquoi ?
Quelle importance !
Demain, plus tard,
Les confidences.
Si douce, ta bouche
Et je m’affole.
Je roule, m’enroule
Et tu t’affoles.
La nuit profonde,
La fin du monde,
Une gerbe de feu
Pour se connaitre,
Se reconnaitre,
Pourpre et or et puis bleue,
Plus rien, plus rien
Que le silence,
C’est bien, nos mains
Et ce silence…

 

 

 

Nothing More

Nothing more, nothing more but the silence – your hand – your hand – and the silence. Some words? What for? Tomorrow, later, secrets. So sweet, your mouth, and I go crazy. I curl up in myself and you go crazy. The deep night, the end of the world, a burst of flame –  to know oneself  – to recognise oneself, purple and gold then blue, nothing more,  nothing more, but the silence. Its good, our hands, and this silence.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Mal de Vivre

 

 
Ça ne prévient pas quand ça arrive
Ça vient de loin
Ça c’est promené de rive en rive
La gueule en coin
Et puis un matin, au réveil
C’est presque rien
Mais c’est là, ça vous ensommeille
Au creux des reins

Le mal de vivre
Le mal de vivre
Qu’il faut bien vivre
Vaille que vivre

On peut le mettre en bandoulière
Ou comme un bijou à la main
Comme une fleur en boutonnière
Ou juste à la pointe du sein
C’est pas forcément la misère
C’est pas Valmy, c’est pas Verdun
Mais c’est des larmes aux paupières
Au jour qui meurt, au jour qui vient

Le mal de vivre
Le mal de vivre
Qu’il faut bien vivre
Vaille que vivre

Qu’on soit de Rome ou d’Amérique
Qu’on soit de Londres ou de Pékin
Qu’on soit d’Egypte ou bien d’Afrique
Ou de la porte Saint-Martin
On fait tous la même prière
On fait tous le même chemin
Qu’il est long lorsqu’il faut le faire
Avec son mal au creux des reins

Ils ont beau vouloir nous comprendre
Ceux qui nous viennent les mains nues
Nous ne voulons plus les entendre
On ne peut pas, on n’en peut plus
Et tous seuls dans le silence
D’une nuit qui n’en finit plus
Voilà que soudain on y pense
A ceux qui n’en sont pas revenus

Du mal de vivre
Leur mal de vivre
Qu’ils devaient vivre
Vaille que vivre

Et sans prévenir, ça arrive
Ça vient de loin
Ça c’est promené de rive en rive
Le rire en coin
Et puis un matin, au réveil
C’est presque rien
Mais c’est là, ça vous émerveille
Au creux des reins

La joie de vivre
La joie de vivre
Oh, viens la vivre
Ta joie de vivre

 

 

 

Les Insomnies

 

 

A voir tant de gens qui dorment et s’endorment à la nuit,
Je finirai, c’est fatal, par pouvoir m’endormir aussi.
A voir tant d’yeux qui se ferment, couchés dans leur lit,
Je finirai par comprendre qu’il faut que je m’endorme aussi.

J’en ai connu des grands, des beaux, des bien bâtis, des gentils
Qui venaient pour me bercer et combattre mes insomnies
Mais au matin, je les retrouvais, endormis dans mon lit
Pendant que je veillais seule, en combattant mes insomnies.

A force de compter les moutons qui sautent dans mon lit,
J’ai un immense troupeau qui se promène dans mes nuits.
Qu’ils aillent brouter ailleurs, par exemple, dans vos prairies.
Labourage et pâturage ne sont pas mes travaux de nuit,

Sans compter les absents qui me reviennent dans mes nuits.
J’ai quelquefois des vivants qui me donnent des insomnies
Et je gravis mon calvaire, sur les escaliers de la nuit.
J’ai déjà connu l’enfer, connaîtrai-je le paradis ?

Le paradis, ce serait, pour moi, de m’endormir la nuit
Mais je rêve que je rêve qu’on a tué mes insomnies
Et que, pâles, en robe blanche, on les a couchées dans un lit
A tant rêver que j’en rêve, les revoilà, mes insomnies.

Je rôde comme les chats, je glisse comme les souris
Et Dieu, lui-même, ne sait pas ce que je peux faire de mes nuits.
Mourir ou s’endormir, ce n’est pas du tout la même chose.
Pourtant, c’est pareillement se coucher les paupières closes.
Une longue nuit, où je les avais tous deux confondus,
Peu s’en fallut, au matin, que je ne me réveille plus.

Mais au ciel de mon lit, y avait les pompiers de Paris.
Au pied de mon lit, les adjudants de la gendarmerie.
Ô Messieurs dites-moi, ce que vous faites là, je vous prie.
Madame, nous sommes là pour veiller sur vos insomnies.

En un cortège chagrin, viennent mes parents, mes amis.
Gravement, au nom du Père, du Fils et puis du Saint-Esprit,
Si après l’heure, c’est plus l’heure, avant, ce ne l’est pas non plus,
Ce n’est pas l’heure en tout cas, mais grand merci d’être venus.

Je les vois déjà rire de leurs fines plaisanteries,
Ceux qui prétendent connaître un remède à mes insomnies.
Un médecin pour mes nuits, j’y avais pensé, moi aussi.
C’est contre lui que je couche mes plus belles insomnies.

A voir tant de gens qui dorment et s’endorment à la nuit,
J’aurais fini, c’est fatal, par pouvoir m’endormir aussi
Mais si s’endormir c’est mourir, ah laissez-moi mes insomnies.
J’aime mieux vivre en enfer que dormir en paradis.
Si s’endormir c’est mourir, ah laissez-moi mes insomnies.
J’aime mieux vivre en enfer que de mourir en paradis…

 

 

 

 

Au Cœur de la Nuit

 

 
J’ai le souvenir d’une nuit
Une nuit de mon enfance
Toute pareille à celle-ci
Une longue nuit de silence.

Moi qui ne me souviens jamais
Du passé qui m’importune
C’est drôle, j’ai gardé le secret
De cette longue nuit sans lune.

J’ai le souvenir d’une nuit
D’une nuit de mon enfance
Toute pareille à celle-ci
Une longue nuit de silence.

Soudain, je me suis réveillée.
Il y avait une présence.
Soudain, je me suis réveillée
Dans une demi-somnolence.

C’était au dehors. On parlait
A voix basse, comme un murmure
Comme un sanglot étouffé
Au dehors, j’en étais sûre.

J’ai le souvenir d’une nuit
D’une nuit de mon enfance
Toute pareille à celle-ci
Une longue nuit de silence.

J’allais, à demi éveillée
Guidée par l’étrange murmure.
J’allais, à demi éveillée
Suivant une allée obscure.

Il y eut, je me le rappelle
Surgissant de l’allée obscure
Il y eut un bruissement d’ailes
Là, tout contre ma figure.

C’était au cœur de la nuit.
C’était une forêt profonde.
C’était là, comme cette nuit
Un bruit sourd venant d’outre-tombe.

Qui es-tu pour me revenir ?
Quel est donc le mal qui t’enchaîne ?
Qui es-tu pour me revenir
Et veux-tu que, vers toi, je vienne ?

S’il le faut, j’irai encore
Tant et tant de nuits profondes
Sans jamais revoir l’aurore
Sans jamais revoir le monde

Pour qu’enfin tu puisses dormir
Pour qu’enfin ton cœur se repose
Que tu finisses de mourir
Sous tes paupières déjà closes.

J’ai le souvenir d’une nuit
Une nuit de mon enfance
Toute pareille à celle-ci
Froide et lourde de silence

 

From the Heart of the Night.

I have the memory of a night, a night in my childhood, a night exactly like this one, a long night of silence.  I, who never look back on the past that bothers me, it’s strange that I held on to the secret of this long, moonless night. I have the memory of a night, a night in my childhood, a night exactly like this one, a long night of silence.  Suddenly I was awakened, and I felt a presence: suddenly I was roused into a half-sleep.  It was outside, someone was speaking in a low voice, like a murmur, like a muffled sob; I was sure it was outside. I have the memory of a night, a night of my childhood, a night exactly like this one, a long night of silence.  I was going, half awake, guided by that strange murmur; I was moving along, following into a shadowy path.  There was, I remember, arising from that shadowy path, there was was a rustle of wings – there, right against my face. It was at dead of night, it was was a deep forest, it was there, like night, a dull sound, emerging from beyond the grave. Who are you, to return to me? And whatever is the evil that shackles you? Who are you, to return to me? And do you want me to come towards you? If it is necessary, I will go again for how every many deep nights, without ever seeing the dawn again – without ever seeing the world again. So that at last you can sleep, so at last your heart can rest, may you finish your dying under your already closed eyelids. I have the memory of a night, a night of my childhood, that seems exactly like this one, cold and heavy with silence.

 

 

 

 

Parce Que

 

 
C’est parce que ton épaule à mon épaule,
Ta bouche à mes cheveux
Et ta main sur mon cou,
C’est parce que, dans mes reins,
Quand ton souffle me frôle,
C’est parce que tes mains,
C’est parce que joue à joue,
C’est parce qu’au matin,
C’est parce qu’à la nuit,
Quand tu dis “viens”, je viens.
Tu souris, je souris.
C’est parce qu’ici ou là,
Dans un autre pays,
Pourvu que tu y sois,
C’est toujours mon pays.
C’est parce que je t’aime
Que je préfère m’en aller.
C’est mieux, bien mieux, de se quitter
Avant que ne meure le temps d’aimer.

C’est parce que j’ai peur de voir s’endeuiller
Les minutes, les heures, les secondes passées,
C’est parce que je sais qu’il faut un presque rien
Pour défaire une nuit et se perdre au matin.
Je ne laisserai pas pencher sur notre lit
Ni l’ombre d’un regret, ni l’ombre d’un ennui.
Je ne laisserai pas mourir au fil des jours
Ce qui fut toi et moi, ce qui fut notre amour.
Pour qu’il ne soit jamais emporté par le temps,
Je l’emporte moi-même. Il restera vivant.

Oh laisse-moi, je t’aime
Mais je préfère m’en aller.
C’est mieux, tu sais, de se quitter
Avant que ne meure le temps d’aimer.

J’en ai vu, comme nous, qui allaient à pas lents
Et portaient leur amour comme on porte un enfant.
J’en ai vu, comme nous, qui allaient à pas lents
Et tombaient à genoux, dans le soir finissant.
Je les ai retrouvés, furieux et combattant
Comme deux loups blessés. Que sont-ils maintenant ?

Ca, je ne veux pas. Je t’aime.
Je ne veux pas nous déchirer.
C’est mieux, tu sais, de nous quitter
Avant que ne meure le temps d’aimer.
C’est mieux, bien mieux, de nous quitter
Avant que ne meure le temps d’aimer…

 

 

 

 

 

Because (I love you)
Its because  –  shoulder at my shoulder,  your mouth against my hair, and your hand on my neck, its because deep inside me, when your breath brushes  against me, its because your hands, its because cheek to cheek – its because in the morning – its because at night. When you say ” come” I come, you smile, I smile, its because here or there, in another land – as long as you are there, its always my land.
 Because I love you, I prefer to leave,  it is better, much better, to leave before the time to love should die.
Its because I fear to see plunged into grief  the passing hours and minutes and seconds, it’s because I know it takes next to nothing to undo a night, to be abandoned in the morning. I will let neither the shadow of regret nor the shadow of boredom hover over our bed . I will not let die as days go by what  we were, you and I and what was our love. So that it will never to be swept away by time, I will remove myself. It will remain alive.  Oh let me leave – I love you, but I prefer to leave. It is better, you know, to leave before the time of love dies. I have seen some, like us, who would drag their steps, and would carry their love as one carries a child. I have seen some, like us, who would drag their steps and then fall to their knees at the end of the evening.  I have found them, furious and fighting, like two wounded wolves. What are they now? That, I do not want. I love you. I don’t want us to be undone. It is better, you know, for us to leave each other before the time to love should die.

 

 

 

 

Mein Kompliment

(Chapeau Bas)

 

 
War das nun Gottes Hand,
war es die Hand des Teufels?
Wer hat mit diesem Blau
den Himmel heut bespannt?
Wer streute auf den See das viele Sonnenlicht,
das auf dem Wasser sich in tausend Blitzen bricht?
War das nun Gottes Hand, war es die Hand des Teufels?
Wer hat das Segelboot in dieses Bild gefügt,
das dort im Sommerwind am Quai vor Anker liegt
und sich voll Ungeduld schon auf den Wellen wiegt?
Hat das Gott so gemacht?
Hat’s der Teufel erdacht?
Haben beide gemeinsam dies Wunder vollbracht?
Leider kann ich nicht sagen,
woran man das erkennt,
doch ich sag’ für diesen Tag:
“Merci, mein Kompliment!”
War das nun Gottes Hand,
war es die Hand des Teufels?
Von wem wohl die Idee zu dieser Rose stammt?
Für wen erblühte sie,
ein Traum aus rotem Samt,
für welche Dame die heut welches Herz entflammt?
War das nun Gottes Hand,
war es die Hand des Teufels?
Die Beeren, leuchtend rot, Im grünen Laub versteckt!
Das Mädchen, das sich dort so in der Sonne reckt!
Die Freude, jung zu sein, hat es noch nicht entdeckt…
Hat das Gott so gemacht?
Hat’s der Teufel erdacht?
Haben beide gemeinsam dies Wunder vollbracht?
Leider kann ich nicht sagen,
woran man das erkennt,
doch ich sag’ für diesen Tag:
“Merci, mein Kompliment!”
Das weiße Segelboot,
das weite Himmelszelt!
Das reife Obst am Baum,
das gold’ne Weizenfeld!
Das große Sommerglück,
das fast die Herzen sprengt.
Wer es auch war, er hat
es dir und mir geschenkt!
Hat das Gott so gemacht?
Hat’s der Teufel erdacht?
Haben beide gemeinsam dies Wunder vollbracht?
Leider kann ich nicht sagen,
woran man das erkennt,
doch ich sag’ für soviel Glück:
“Messieurs, mein Kompliment!”
sag’ für dich und mich: “Merci, mein Kompliment!”

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chapeau Bas

 

 

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Jacques Prévert (February 4th 1900 - April 11th 1977)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Barbara

 

 

 

 

Remember Barbara
It rained incessantly on Brest that day
And you walked smiling
Radiant delighted streaming wet
In the rain
Remember Barbara
It rained incessantly on Brest
And I came across you on Siam Street
You were smiling
And I smiled too
Remember Barbara
You whom I did not know
You who did not know me
Remember
Still remember that day
Do not forget
A man was sheltering under a porch
And he called out your name
Barbara
And you ran to him in the rain
Dripping enchanted blossoming,
And you flung yourself into his arms
Remember that Barbara
And do not be mad if I address you as tu
I say tu to all those I love
Even if I have seen them only once
I say tu to all who love each other
Even if I do not know them.
Remember Barbara
Do not forget
This rain wise and happy
On your happy face
On this happy city
This rain on the sea
On the arsenal
On the boat Ushant
Oh Barbara
What a bloody farce this war.
What has become of you now
Under this rain of iron
Of fire of steel of blood
And the one who enclosed you in his arms
Lovingly
Is he dead or disappeared or indeed still living
Oh Barbara
It rains constantly in Brest
As it was raining before
But this is not the same and everything is ruined
This is a rain of mourning terrible and desolate
Now it is not even the storm
Of iron of steel of blood
But merely of clouds
That simply die like dogs
Dogs that disappear
In the water flowing over Brest
And will rot away
In the distance far from Brest
Of which nothing remains.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Barbara

 

 

 

Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest ce jour-là
Et tu marchais souriante
É panouie ravie ruisselante
Sous la pluie
Rappelle-toi Barbara
Il pleuvait sans cesse sur Brest
Et je t’ai croisée rue de Siam
Tu souriais
Et moi je souriais de même
Rappelle-toi Barbara
Toi que je ne connaissais pas
Toi qui ne me connaissais pas
Rappelle-toi
Rappelle-toi quand même ce jour-là
N’oublie pas
Un homme sous un porche s’abritait
Et il a crié ton nom
Barbara
Et tu as couru vers lui sous la pluie
Ruisselante ravie épanouie
Et tu t’es jetée dans ses bras
Rappelle-toi cela Barbara
Et ne m’en veux pas si je te tutoie
Je dis tu à tous ceux que j’aime
Même si je ne les ai vus qu’une seule fois
Je dis tu à tous ceux qui s’aiment
Même si je ne les connais pas
Rappelle-toi Barbara
N’oublie pas
Cette pluie sage et heureuse
Sur ton visage heureux
Sur cette ville heureuse
Cette pluie sur la mer
Sur l’arsenal
Sur le bateau d’Ouessant
Oh Barbara
Quelle connerie la guerre
Qu’es-tu devenue maintenant
Sous cette pluie de fer
De feu d’acier de sang
Et celui qui te serrait dans ses bras
Amoureusement
Est-il mort disparu ou bien encore vivant
Oh Barbara
Il pleut sans cesse sur Brest
Comme il pleuvait avant
Mais ce n’est plus pareil et tout est abimé
C’est une pluie de deuil terrible et désolée
Ce n’est même plus l’orage
De fer d’acier de sang
Tout simplement des nuages
Qui crèvent comme des chiens
Des chiens qui disparaissent
Au fil de l’eau sur Brest
Et vont pourrir au loin
Au loin très loin de Brest
Dont il ne reste rien.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

This translation is based on, modified and adapted from on-line sources who have not been credited. I read and rejected the widely-known translation by Lawrence Ferlinghetti because I felt that it was not sufficiently faithful to or respectful of Prévert’s pure and innocent original.

This beautiful evocative poem by the lovely poet Jacques Prévert  speaks so feelingly of one swift fleeting moment, in WW2 in the midst of an extended downpour.  An ordinary pedestrian glimpses a woman as she runs to meet her lover.

The woman smiles at the stranger – they do not know each other, but they do not need to – because so much can sometimes be known about a stranger without a word being exchanged.

She smiles at him – why? Probably because when one is happily in love, smiles and laughter are as irrepressible as breathing.

Prévert knows only that the woman’s name is ‘Barbara’ – because he hears her lover call out to her.

The rain that has gone on and on all day in the city of Brest cannot dampen the rapt intensity of feeling that she exudes, and which has made her so unforgettable to Prévert. When he recalls this moment, perhaps many years later, he is full of anxious questions. – What has become of this woman? What has become of the man – probably a soldier – she was racing to meet?

When Prévert asks these questions of her – but obviously to himself – he uses ‘tu’ used in French to address close friends and relatives and people with whom one is intimate, rather than the formal ‘vous’ reserved for strangers and non-intimates. He asks, touchingly, that she not be offended by his presumption, because, he says, he addresses in this intimate form all those he loves – and all those who love each other.

Prévert was gay, but he is sweeping into his inclusive nonjudgmental embrace all lovers, with whom he himself shares a deep bond. We also know how he feels, because most of us who read this poem will love Barbara too, and share Prévert’s anxiety about her fate.

This was around 1940 during WW2 when the city of Brest in the Brittany peninsula was bombed and the bridges destroyed and the city reduced to rubble by the allies in their effort to get rid of the deeply entrenched German invaders. The Germans surrendered the city to the allies in 1944.

Like Prévert, we too have to come to terms with the awful, sickening ‘not-knowing’ that comes with the aftermath of terrible and destructive events. We have to allow ourselves to wonder, without the slightest comfort of even the flimsiest assurance, about the fate of people and animals – lovers, women, soldiers, dogs – whose lives are suddenly swept away and who are never heard of again.

This feeling of intimate familiarity and concern that can flare up in us in response to catching a glimpse of the radiance of love in a passing stranger, is something that Prévert has captured with great fidelity and total simplicity.

He has wrapped up his heart in this small lucid moment and handed it to us – who are also strangers.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Though the name of Jacques Prévert is not very well know by non-Francophones, his beautiful poem ‘Autumn Leaves’ (Les Feuilles Mortes) written in 1945 and set to music by Joseph Kosma, has been made popular by dozens of singers and musicians such as Jo Stafford, Edith Piaf, Julianne Greco, Nat King Cole, Frank Sinatra, Andrea Bocelli, Yves Montand and Chet Baker.

The English lyrics of this song were written by Johnny Mercer.

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